mardi 31 août 2010

Séparation des pouvoirs

"On a besoin de prendre un peu de distance et de réfléchir."
Non. Moi j’ai besoin de te parler. Toi, tu veux pas me voir dans les parages parce que tu veux instaurer peinard ton tribunal intime. Tu feras mon procès, tout seul dans ta tête. Tu pourras ressasser à l’envi tout ce qui ne colle pas et les milles et unes raisons pour lesquelles nous ne sommes pas faits l’un pour l’autre. De temps en temps tu enverras par SMS une question biaisée dont j’ignorerai l’origine et le contexte et à laquelle j’aurai mille chances de répondre à côté de la plaque et forcément à charge.
Moi pendant ce temps, je devrai me faire une raison. Essayer de trouver mon équilibre dans l’incertitude. Et quand ce sera fait, tu viendras m’asséner le coup de pelle de ton verdict derrière la nuque.
Alors bien sûr je m’accrocherai et je crierai à l’injustice, à la manipulation, au complot et au coup monté.

Merci mon dieu d’avoir créé le blog pour que je puisse moi aussi exprimer ma mesquinerie. Si notre justice est corrompue, au moins, nous avons la liberté d’expression.

samedi 21 août 2010

Eclaircie

Ces derniers temps, tout était devenu hostile. L’intérieur comme l’extérieur. Mon propre corps.
Depuis plus d’un mois je ne marche plus normalement parce que je me suis blessé le pied, il me faut donc des béquilles. A 28 ans, j’ai l’impression que mon corps n’est plus le même, qu’il n’encaisse plus tous les chocs, que lentement et inexorablement il va se mettre à me lâcher par petits bouts. Cette idée m’angoisse et il me faut du temps pour m’y habituer.

A cause de mon infirmité toute relative, je me suis enfermée lentement, faisant de tout un obstacle insurmontable. Annulé mes vacances, esquivé les sorties, les soirées, les visites... Je restais chez moi, à regarder les heures défiler dans l’ennui. M’enfonçant lentement dans une léthargie dont je ne souhaitais plus sortir.

Et puis chez moi, c’est devenu l’enfer. Deux souris ont débarqué un soir, alors que je végétais chez moi, snobant encore une fois une soirée à laquelle il me semblait trop pénible de me rendre. Et ce fut l’explosion. La panique. Les hurlements. Les pleurs convulsifs. Je suis partie de chez moi au milieu de la nuit et pendant une semaine, je n’ai pas pu dormir dans mon appartement. Jetée dehors, bien obligée d’avancer, je suis enfin partie voir la mer. Et j’ai parlé un peu. Et l’angoisse a pris un visage. Plusieurs, au fil des mots. J’avais encore peur.

Il a bien fallu rentrer. Affronter l’appartement, les obligations pour la rentrée, parler aux gens et travailler un peu. Et la pluie s’est mise à tomber, la température à chuter et l’odeur du mois de septembre envahissait tout comme un brouillard d’angoisse qui me pénétrait progressivement.
Chez moi, j’étais toujours aux aguets, sursautant au moindre bruit, jetant sans arrêts des coups d’oeil au placard maléfique d’où les souris semblaient provenir, me demandant si je saurais rester calme dans le cas d’une nouvelle invasion.

Et puis ma voisine a proposé de m’aider. Je me méfiais d’abord. Et finalement, je l’ai laissée s’introduire. Je l’ai regardée, benoîtement, assise par terre, les doigts pleins de mastic, reboucher patiemment les trous dans le mur. J’ai obéi à ses directives : sortir le frigo, nettoyer les crottes de souris, passer la tête par le placard qui me terrorisait pour vérifier s’il y avait d’autres trous. Je l’écoutais parler et elle me semblait vaguement irréelle, je n’arrivais pas à croire qu’elle était là, à faire ce qu’elle faisait. J’en aurais pleuré de soulagement. La vieille qui me semblait vaguement folle et un peu pénible devenait quelqu’un. Avec une histoire que j’ignorais, des activités qui m’étaient inconnues et des compétences qui étaient en train de me sauver de la folie.
Tout simplement, elle m’a obligée à regarder en face ce qui me faisait peur. Et je l’ai vue affronter cette chose. Et le mur derrière le frigo n’est plus un coin sombre, sale et plein de monstres. C’est un mur dont je connais les recoins, les tuyaux, même derrière les endroits inaccessibles, parce qu’elle m’a obligée à aller voir.

Mon appartement est à nouveau chez moi.
Et ma voisine n’est plus une vieille un peu pénible, c’est devenu quelqu’un.

samedi 14 août 2010

S.O.S.

L'angoisse flotte autour de moi. Elle va et vient et de temps en temps tombe sur mes épaules.
Parfois elle s'accroche aux objets, aux cauchemars, aux souris qui entrent dans ma maison.
Des pleurs et des hurlements dans la nuit.
Quelqu'un à appeler. A l'aide.

Home

Des maisons. Les maisons qu'on apprend à dessiner, petit. Des plans de maisons qu'on invente. Celles qu'on construit sur le tapis pour les Playmobils. Celles en trois dimensions, en Légos ou en rondins de la cabane du forestier. Les maisons des Barbies, installées dans la bibliothèque sous les albums des Schtroumpfs.
Et rêver de maisons. Celle qu'on aura plus tard. Celle qu'on rêverait d'avoir. Celles qu'on croise dans la campagne sur la route des vacances et dont on fantasme les transformations. On fait des plans et des budgets. Et elles disparaissent.
Les maisons des autres, qu'on visite et qu'on réinvente. Qu'aurait-on fait à leur place ?
On passe en revue des centaines, des milliers de maisons. On y installe les copains, la famille, le buffet vintage de mamie, le piano, un amoureux, des animaux. Des enfants ?
Ces maisons-là n'ont jamais ni souris ni cafard.